À la carte : une vie en couples ?

À la carte : une vie en couples ?

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Amour, PhiloSex

28 May 21

Pour l’anecdote, mon correcteur d’orthographe me signale que « en couples », ça n’est pas correct, il veut que j’enlève le « s »… z’avez qu’à voir, ça commence mal…
Il serait sans doute temps d’abandonner le menu du grand-père et d’élargir nos statuts civils célibataire-marié-divorcé (un peu raide que ce dernier soit un « statut » d’ailleurs 😱).
Même si je ne suis pas sûre qu’il faille absolument mettre une étiquette à nos relations, en cette époque de racialisme et de politiques d’identités catégoriser notre rapport à l’autre nous aidera sans doute à nous sentir « appartenir », surtout pour ceux qui s’essayent aujourd’hui à des liaisons d’un nouveau genre et qui se sentent taxés de fous, d’instables voire d’obsédés : un signe astrologique, un profil Eneagramme ou P.N.L. ça nous définit, ça nous intègre, ça nous rassure.
Voici onze profils de modes relationnels qui chacun comporte sa part de bonheur, de défi et d’enjeu.

Relations amoureuses, statutaires, sexuelles et/ou émotionnelles : seul, à deux ou à plusieurs, au XXIè, c’est « à la carte ».

1 - Jambon-Beurre : Le couple classique
Jusque là, pas de surprises. On s’est connu, souvent on s’est aimé follement, on s’aime encore d’ailleurs, d’une certaine façon. On fait vœu de partage d’un projet de vie commune, comprenant l’habitat, l’exclusivité des corps, on s’inscrit dans la durée, et sur les registres de l’état civil.
Bonheur : Sécurité affective, sécurité relationnelle. Sécurité !
Défi : Se respecter dans ses différences.
Enjeu : Se renouveler.


2 - Smoothie : Le couple fusionnel
On prend deux moitiés d’orange qu’on presse jusqu’à l’écorce, on y rajoute plein de fruits de saison bien frais et bien sucrés et on mixe avec vigueur jusqu’à obtenir un philtre d’amour doux et vivifiant.
On savoure aussi longtemps que possible (ou on boit cul sec) et on passe à autre chose.
Comme disait Claude Sarraute : « L’objectif est de ne devenir plus qu’un. Oui, mais lequel 😅 ? »
Bonheur : Identification, passion.
Défi : Garder son identité.
Enjeu : Transformer cet amour sans perdre trop de plumes…


3 - Tartare-Frites : Le couple indépendant
Ça va bien ensemble, mais pas mélangé. Une assiette pour le tartare, une autre pour les frites. Chacun garde sa texture croustillante ou tendre, sa température froide ou brûlante.
Mais ça se dévore ensemble.
Bonheur : Liberté, moments choisis, l’air frais du dehors revigore la relation.
Défi : Les tentations des nouvelles découvertes dans l’espace alloué.
Enjeux : Déterminer et garder ses priorités individuelles et de couple.


4 - Jambon-Beurre-Rance-&-Pain-Rassis : Le couple divorcé
On acte l’échec de l’espoir investi dans un des trois couples précédents.
Souvent aigri, on se dédommage au travers de luttes intestines.
C’est un état émotionnel auquel je fais référence ici, non un statut légal : on peut être divorcé et tout à fait heureux, ou sur une fin de relation quelconque et dans un état émotionnel rance&rassis.
Bonheur : Le plaisir de la lamentation, l’expression de la colère et de la vengeance.
Défi : L’homme : « tu touches à mon flouz, j’te tue ». La femme : « tu touches à mes gosses, t’u’ar’ ta gueule » …
Enjeu : Que ça ne dure pas trop longtemps.


5 - Navet : Le célibataire exclusif
Qui prend sa condition de célibataire au sérieux.
Le navet. Une racine. Comestible… C’est un peu raide le navet.
Par conviction, peur ou choix (ou obligation, voir Asexualités) on ne se mélange pas. C’est une règle, qu’on s’le dise.
Bonheur : Pas de hauts&bas émotionnels.
Défi : Ne pas devenir aigri ou vindicatif.
Enjeu : Éviter de finir Incel (Involuntary Celibate) et misanthrope.


6 - Fleur Bleue : Le célibataire malgré lui
Il aimerait bien, mais il rêve tellement haut qu’il ne trouve point de pont entre sa réalité et son rêve. Son exigence est trop forte. Il veut tout. Mais comme « tout » ce n’est pas possible, il souffre le « rien ».
Bonheur : Se lover dans sa mélancolie.
Défi : Limiter son spleen et les poèmes qui encombrent sa boite d’envoi.
Enjeu : Accepter de troquer une réalité parfaite pour une réalité digne.


7 - Intermittent du spectacle : Le poly-sexuel sans couple
Il ne veut pas de couple, mais il a des amis ou amies avec qui il/elle partage des moments d’intimité qui peuvent varier en fréquence, intensité ou style ou tout mélangé (pianotant sur la gamme qui va du PCRA - Plan Cul Régulier Affectif à l’ONS - One Night Stand).
Bonheur : 100% fun.
Défi : Ne pas s’attacher.
Enjeu : Avoir une vie équilibrée par ailleurs en termes d’affection et de projets personnels.


8 - Serial lover : En couples, mais les uns après les autres
Ses relations de couple sont exclusives, intenses, souvent nouvelles et excitantes, mais pas très longues.
Bonheur : Des relations entières et intenses qui ne s’installent pas dans la monotonie.
Défi : Garder la tête froide et ne pas s’engager à corps perdu.
Enjeu : Savoir fêter les fins d’histoires.


9 - Jambon-Beurre-Crudités (ou fromage, selon les goûts) : Le poly-sexuel en couple
Il n’y a pas de vœu d’appartenance sexuelle. C’est un couple classique mais ouvert à d’autres rencontres sexuelles. On peut s’aventurer seul ou à deux, chacun de son côté ou ensemble, ou à plus, ou pas. Le principe est le même : l’objet du couple est découplé des jeux sexuels, mais on s’interdit toute dérive émotionnelle en dehors de l’union principale.
Bonheur : Stabilité relationnelle, sécurité affective, projet de vie, encas croustillants.
Défi : Se protéger des émotions qui percent.
Enjeu : Comme disent les suisses : « Bien garder l’église au milieu du village ».


10 - Salade de saison : Le poly-émotionnel en couples
Plus de jalousie, plus de possession, plus de limites sur ce que l’on ressent. On aime à chaque fois que ça nous passe par le cœur. On aime souvent, beaucoup. Les ingrédients se mélangent, ou pas.
Il n’y a pas vraiment un couple plus important qu’un autre, on les aime tous, ce sont des petits morceaux de vie que l’on partage avec plusieurs personnes, souvent avec des affinités différentes selon chacun (intellectuelle, affective, culinaire, sexuelle…).
Entre les uns et les autres on partage le détail de ses histoires, ou pas.
À chacun sa salade.
À chacun sa sauce.
Bonheur : Se laisser traverser par la vie.
Défi : Ne pas se perdre dans les amours reçus.
Enjeu : Laisser danser ses émotions, tout en sachant dire non. Suivre son cap personnel.


11 - Omelette variée : Le poly-émotionnel et poly-sexuel en couple
C’est un couple classique ouvert qui s’autorise d’autres rencontres ou relations sexuelles et/ou émotionnelles.
Après avoir amalgamé les œufs, quelques champignons, légumes ou fromage raviront les papilles de nos plus fins gourmets.
Un principal, un partenaire, un amour plus fort, un « nous d’abord » sans pour autant réfuter ses émotions dans les rapports intimes avec d’autres personnes. Attention cependant à ne pas ajouter plus d’ingrédients qu’il n’y a d’œufs et donc ainsi perdre la contexture même de l’omelette…
Voir également la version espagnole, « tortilla » où l’importante proportion de pommes de terre peut donner un certain équilibre à l’alliance des œufs, entendez par là « à la relation principale » 😉.
Bonheur : Stabilité relationnelle, référent affectif, projet de vie, richesse émotionnelle, casse-croûtes variés.
Défi : Éviter les oeufs brouillés. Ne pas se tromper de partenaire principal. Contrôler les dérapages dans les émotions hors couple principal.
Enjeu : Faire danser ses émotions et ses relations sexuelles en harmonie tout en gardant une main sur le changement de vitesse 🙃. Conduite rallye, quoi.


Les couples 2-4 et 8-11 peuvent être cohabitants ou non.

Chacune de ces configurations relationnelles peut nous convenir à un moment donné de notre vie. Elles peuvent se succéder, ou s’alterner. Il n’y a pas d’ordre. Elles ne suivent pas d’évolution particulière.
On a tous envie à un moment donné d’un certain degré de sécurité, que cela signifie pour nous d’être libre ou bien de se sentir validé par l’autre. On a tous certains besoins affectifs, plus ou moins importants dans le temps, que ceux-ci soient dispensés par la même paire de bras ou plusieurs. On a tous certaines attentes sexuelles, plus ou moins extravagantes en fonction des époques, que celles-ci soient satisfaites par une seule personne ou plusieurs (l’un après l’autre ou à la fois 😋).
Chacun peut choisir le mode relationnel qui lui fournira le contexte le plus propice à sa propre réalisation à un moment t.
« Là où ça pousse pour lui » dirait Franck Lopvet.

Notre mode relationnel est une prédiction auto-réalisante : si je décide que mon couple est EMU (Exclusif-Monogame-Ultime), je décide de juguler un éventuel niveau de frustration pour suivre les invectives de ma culture, de mon éducation ou de ce que je pense qui est bien. Ça marche aussi longtemps que j’y crois.
L’échec, ou la relation malheureuse, est là quand on essaye de maintenir une relation dans un mode qui ne nous correspond pas ou plus. L’honnêteté envers soi-même et la reconnaissance de ses propres besoins nous permet d’embrasser le mode relationnel qui les satisfait et qui est pour nous le plus épanouissant.
Plutôt que d’exiger des réponses d’une relation qui clairement n’est pas en mesure de les donner et ainsi ne faire que l’envenimer, mieux vaut les satisfaire ailleurs !

Morale de l’histoire : « Ne te fâche pas avec le puits sec parce qu’il ne te donne pas d'eau, demande-toi plutôt pourquoi tu continues à vouloir prendre de l'eau là où il est pourtant bien clair que tu ne la trouveras pas  ».


Ils en parlent :

Sex Friends - Richard Mèmeteau
La salope éthique - Dossie Easton & Janet W. Hardy

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